PVT Canada 2020 Road trip Québec & Maritimes

Sur les routes canadiennes #2 : au fil du fleuve Saint-Laurent

21 janvier 2021

Après le calme vient la tempête, et après la tempête, vient la tempête. Étape 2 de notre road trip qui nous emmène jusqu’aux provinces maritimes : nous restons sur la rive Sud du Saint-Laurent pour remonter petit à petit ce magnifique fleuve. Je ne l’avais jamais vu au-delà de Québec où sa largeur reste celle d’un fleuve classique, il a rien de foufou, quoi. Mais plus on roule vers son embouchure, le long des rives par les voies secondaires, plus on est stupéfaits : ce fleuve, c’est pas un fleuve, c’est une mer. C’est jour de tempête à Saint-Jean-Port-Joli, le ciel est gris, le fleuve est gris, les berges sont au moins tout aussi grises : il vente tellement que l’on tient à peine debout, ce qui ne décourage pas les mordus de kite surf de se jeter dans les eaux tumultueuses (rien que d’y penser, j’en ai des frissons dans le dos). On mange notre mauvais sandwich aux oeufs et nos cheetos orange fluo depuis l’habitacle de notre voiture, garés face au fleuve, et on profite du spectacle, en prenant notre temps.
Ça fait une dizaine d’années que j’aiguille les pvtistes pour qu’ils réalisent leurs rêves canadiens, et que je les aide à choisir leur(s) province(s) de destination. Je suis évidemment très attachée au Québec, sans grande surprise, mais je les ai toujours encouragés à aller voir ailleurs – puisque le Canada est vaste et a beaucoup à offrir – au lieu de tous venir s’entasser au Québec. Oui, mais… ailleurs au Canada, il n’y a pas le Saint-Laurent. Cette pensée m’a frappé subitement : le reste du Canada, c’est bien joli, mais finalement, rien n’arrive à la hauteur du Saint-Laurent, sa beauté, sa majesté, son impetuosité et sa si riche histoire.

Quatre jours à Rivière-du-Loup : balades et couchers de soleil majestueux

Une fois n’est pas coutume, on avait rien planifié de particulier, on avait seulement quelques nuits au camping municipal de Rivière-du-Loup en poche. Il est tout proche d’une belle plage : c’est tout ce qu’on savait. On a découvert en Rivière-du-Loup une très belle petite ville où la vie semble douce : la rue principale est bien restaurée et laisse la part belle au piéton, et, en plein centre, l’immense parc des Chutes offre des journées entières d’exploration. À Rivière-du-Loup, il y a évidemment des centres commerciaux bin laites un peu de partout, mais on est en Amérique du Nord, on ne peut pas y échapper. On passe le plus de temps possible à la Pointe, une bande de terre avec une ambiance de station balnéaire, avec bien sûr, vue sur le fleuve. On s’est amusés à se demander à quoi ça ressemblerait de vivre ici… Ça semble si agréable. Ces quatres jours ont été fait de douces découvertes, au rythme de nos pas, d’orages nocturnes et de soirées venteuses, de visites avec une ancienne collègue lyonnaise (aujourd’hui installée pour un moment dans le Bas-Saint-Laurent), de bonnes bières un peu trop fraîches compensées par des soupes de lentilles pas trop bonnes.

Covid oblige, il n’y a pas beaucoup de touristes à Rivière-du-Loup, ni dans les rues, ni sur la plage, si ce n’est des locaux qui profitent des journées d’été qui s’étirent. Nous vivons notre premier et seul coucher de soleil sur le Saint-Laurent (parce que : la tempête, avez-vous oublié ?). C’est magique, il n’y a pas d’autre mot. Je crois n’avoir jamais vu un coucher de soleil aussi beau (sauf peut-être en Martinique ou à Capitol Reef ?), sur cette mer qui n’en est pas une. L’avantage d’être de ce côté-ci de la rive, c’est que l’on peut admirer les falaises abruptes du Saguenay et les jeux de lumière du soleil qui finit par se cacher derrière. Il y a seulement 20 km entre les deux rives, ça nous parait immense mais… rien par rapport à ce que l’on verra dans les jours à venir. On plisse les yeux pour tenter d’apercevoir une baleine ou un béluga, c’est peine perdue. Après la tempête, le calme est venu, et cette presque-mer est d’huile. Les enfants chahutent dans l’eau, à la lumière tombante (pour notre peau de lyonno-provençal et de lyonno-espagnole, elle est beaucoup trop froide). Après plusieurs mois de stress intense lié au confinement et à notre situation administrative au Canada, on lâche un peu de lest et on souffle.

Reprenons la route des Navigateurs

Avant d’arriver à Rivière-du-Loup, nous suivions cette superbe route touristique depuis plusieurs dizaines de kilomètres et c’est tout naturellement qu’on décide de quitter la ville par celle-ci, d’autant qu’elle passe à côté de notre camping. Première étape, Cacouna, où nous retournons une énième fois (un vrai coup de coeur, ce petit village !) pour acheter une divine chocolatine (je n’accepte d’utiliser ce mot qu’au Québec) au Magasin Général. Seconde étape, l’Isle Verte, sous un vent encore insupportable mais cette fois-ci avec un grand ciel bleu. Nous avons l’impression d’être en plein coeur de l’Irlande (même si nous n’y sommes jamais allés, donc notre expertise est très réduite) ! Trois-Pistoles, Saint-Simon, nous nous arrêtons à chaque étape et nous ne sommes pas déçus. Chaque village est plus charmant que le précédent ! Mais ce vent, encore ce vent, qui nous fait imaginer les hivers glaciaux au bord du fleuve…

Nous avons encore beaucoup de route puisque ce soir, nous dormons en Gaspésie. Nous décidons tout de même de passer la journée au parc national du Bic, qui nous fait rêver depuis que nous avons mis les pieds au Québec il y a quelques mois. Encore sous cette tempête, le Bic est sublime et tient ses promesses, malgré une foule dense qui nous empêche parfois de profiter de la beauté de ses paysages… bretons. Décidemment, le long du Saint-Laurent, on a l’impression d’être de partout dans le monde ! Le Bic est rocailleux, gris, il y a toutes ces petites îles de partout, ces plages de sable ou de galets, ces falaises abruptes, ces herbes hautes qui se plient au vent, les marées, oui, les marées ! Si on me dit encore une fois que le Saint-Laurent n’est qu’un fleuve… Je n’y comprends rien. La constante, c’est ce vent : je n’ai jamais connu des rafales pareilles. Sur la plage, nous nous envolons même en nous tenant l’un l’autre (et je ne suis pas particulièrement un poids plume) : nos semelles frôlent à peine le sol et nous nous laissons emporter par les rafales… Avant de rebrousser chemin : c’est peine perdue.


Le vent nous pousse dans le dos pour le dernier arrêt de la journée : Rimouski. J’ai toujours voulu aller à Rimouski. Depuis que je suis ado, j’entends ce nom de ville, et il me semble si exotique, si lointain, que oui, je n’ai pas peur de le dire : je rêve de Rimouski. Le fleuve s’y élargit grandement : 50 km. On ne voit même plus la rive d’en face, tant le temps est brumeux et tant il faut plisser les yeux. À Rimouski, on s’offre un plaisir immense : prendre un café en terrasse, abrités contre le mur d’un bâtiment historique tout de brique. C’est merveilleux, c’est divin, il n’y a pas d’autres mots… Et puis : j’ai enfin mis le pied à Rimouski. La ville en elle-même n’est pas la plus jolie, ce n’est pas la plus moche non plus, mais il y a une ambiance très particulière, un peu comme l’ambiance d’une ville qui est à la fois au bout du monde et à la fois seulement une étape de transition.
À grands regrets, on quitte la magnifique région du Bas-Saint-Laurent (qui aura été un nouveau coup de coeur auquel on ne s’attendait pas) pour filer vers la vallée de Matapédia, en Gaspésie, où nous allons passer une courte nuit avant d’entamer la traversée du Nouveau-Brunswick. Je me sens épuisée après une si grosse journée de route, qui aura d’ailleurs été de plus en plus sinueuse à mesure que l’on a quitté les berges du fleuve. Le paysage change brutalement : on tombe dans le royaume des scieries, des chasseurs et des pêcheurs de saumon, on traverse beaucoup de petits villages en déprise, avec des bâtiments en passe de s’effondrer, c’est pas très joyeux. L’océan se rapproche cependant, et la Nouvelle-Écosse aussi : c’est parti !

Une chanson, une lecture, une couleur, une odeur – Bas-Saint-Laurent

Une chanson pour un état d’esprit :

La douce mélancolie de The 1 de Taylor Swift qui collait parfaitement à nos grands silences en voiture, admirant le paysage et ayant comme bruit de fond le bruit de la pluie et des essuies-glace sur le pare-brise.

Une lecture qui aura marqué ce moment :

L’été diabolik de Thierry Smolderen.

Une couleur :

Le gris, bien sûr ! On a passé quatre jours de gris, à l’exception près d’un flamboyant coucher de soleil.

Une odeur :

Celle de la pluie, tantôt qui exalte l’odeur des épines de pin, tantôt qui se mêle à celle de la vase sur la plage.

2 Comments

  • Reply
    Pauline
    21 janvier 2021 at 17:48

    C’est vrai que le Saint-Laurent n’a plus grand chose d’un fleuve passé Québec … Et puis comme toi je me suis interrogée au Parc du Bic justement, c’est quoi cette histoire de marée pour un fleuve ?!
    Encore un grand plaisir de te lire ! Et puis là je connais certains endroits dont tu parles alors j’ai mes images enneigées en superposition de tes descriptions, c’est marrant :)

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