Parcs nationaux PVT Canada 2020 Road trip Québec & Maritimes

Sur les routes canadiennes #6 : la côte est du Cap Breton – Ingonish et la forteresse de Louisbourg

30 mars 2021

Après plusieurs jours du côté de Chéticamp, nous reprenons le Cabot Trail pour poursuivre notre découverte de l’île et du beau Parc national des Hautes-Terres-du-Cap-Breton. Nous prenons une journée complète  pour faire les 100 km qui nous séparent de notre futur camping au coeur du parc national, résolus à faire toutes les balades que nous croiserons. Le Cabot Trail est exceptionnellement désert pendant ce jour de mois d’août au ciel menaçant. Cette fois-ci, nous partons avec un vrai café acheté à Chéticamp : je ne pourrai pas supporter un jour de plus le goût du café instantané Nestlé, encore pire ici qu’en France. Je regrette chaque jour ma cafetière italienne qui m’attend au chaud dans un carton dans le Bugey… Bref, retour à notre belle route sinueuse qui s’assagit à mesure que l’on avance vers le nord. Les points de vue sont nombreux mais nos pauses photo brèves tant le vent nous emporte.

À nous le Cabot Trail !

Au point de vue Mckenzie Mountain, on peut observer de vilains complexes touristiques se trouvant juste en bordure du parc national, c’est aussi surprenant que décevant. De manière générale, les vues sur Pleasant Bay sont suffisamment laides pour ne s’arrêter qu’un peu plus loin, au Macintosh Brook campground, exceptionnellement fermé cette année. De nouveau sur le territoire du parc national, nous faisons une petite balade matinale extrêmement agréable, une fois de plus seuls, au milieu d’une forêt acadienne préservée. Le clapotis de l’eau et le bruit feutré de nos pas sur la terre est doux. Une parenthèse enchantée.

À quelques mètres de là, le sentier de Lone Sheiling est lui aussi très chouette, nous présentant la réplique d’une cabane écossaise. Comme d’habitude là où nous aurions pu en voir, nous n’avons même pas aperçu l’oreille d’un orignal… Et on cherche toujours les baleines, aussi, d’ailleurs. Sentier suivant : le Pin gris, plutôt sympathique mais pas exceptionnel, dont la signalisation est confuse, comme systématiquement (mais quand je dis systématiquement, c’est vraiment TOUJOURS) dans les parcs de Parcs Canada.

Ingonish, une étape à rater

Un peu rincés par la route, on repart à Ingonish pour rejoindre notre camping. On se demande quand même pourquoi on a réservé autant de nuits sur la côte est du parc, il n’y a quand même pas tant de choses à faire par ici et les paysages nous paraissent quand même bien moins spectaculaires. Soit, on découvre le camping qui est sans doute l’un des pires où j’ai pu aller de ma vie – en gardant en tête le standing relatif des campings de parcs nationaux. Vraiment : une honte. Les emplacements de tente sont en plein soleil, on doit se garer sur l’emplacement contre la tente et la table, et surtout, il n’y a que deux mètres quarante entre notre table de pique-nique et celui de nos voisins. Oh, en lisant les commentaires très canadiens (donc très policés), il était bien question d’un certain manque d’intimité, ce que j’appelerais plutôt en bonne française un certain foutage de gueule. D’autant que nous nous méprenons pas, il nous coûte 35 balles, cet emplacement.

Bon, clairement, ça nous emmerde, mais on a déjà payé d’avance trois nuits, alors on va en tirer le meilleur. Le meilleur, justement, c’est qu’il y a un sentier entre le camping et la plage ! Il ne fait plus trop mauvais, on peut aussi passer un peu de temps à lire en regardant l’océan, après tout. Sauf que la plage d’Ingonish nous laisse… songeurs. Un parking/terrain vague nous accueille, bordé par un gros tas de galets. Derrière : deux mètres de plage en pente. C’est vraiment ultra moche, y’a pas d’autre mot. On va demander à la ranger si nous pouvons obtenir le remboursement des nuits suivantes et heureusement, ça passe sans problème. Ça tombe bien, parce que la nuit est pire que le jour : nous sommes collés aux sanitaires qui ne s’éteignent pas la nuit et qui en plus donnent une lumière directe et vive sur le camping. J’ai remarqué que c’était le cas dans tous les campings Parcs Canada et je ne peux que déplorer leur retard par rapport aux campagnes de préservation du NPS (pas de lumière directe mais diffuse, extinction automatique à partir d’une certaine heure – pour ne perturber ni la faune ni les campeurs). Le truc sympa, c’est que nous sommes réveillés en douceur à 6 h du matin par des enfants qui jouent sur un tourniquet perpétuellement grinçant. Café dégueu, repliage de tente, on saute dans la voiture. Bon, au moins ça nous permet de partir tôt pour la prochaine étape : la forteresse de Louisbourg, dont j’attends la visite avec une grande impatience.

La forteresse de Louisbourg, une merveille

Je ne vais pas mentir : je suis impatiente et je trépigne. Après la découverte du village historique de Sherbrooke qui demeure l’une de nos visites préférées de la province, nous avions beaucoup d’attentes concernant la forteresse de Louisbourg qui elle, n’est pas municipale mais appartient à Parcs Canada. Il s’agit d’un haut lieu de l’histoire canadienne : c’est une reconstruction (extrêmement fidèle et réalisée dans les règles de construction de l’époque) d’une partie d’une ville coloniale française. Cette année, encore à cause du Covid, de nombreux bâtiments sont fermés. Notre grande chance, c’est encore une fois d’avoir l’impression d’être extraordinairement privilégiés : d’après la guide, nous sommes quinze visiteurs au lieu de deux mille visiteurs quotidiens au cours d’un mois d’août ordinaire. Je ne sais même pas par où commencer pour parler de Louisbourg. C’est un coup de coeur absolu ! Certains bâtiments sont occupés par des guides-comédiens costumés, jouant les rôles des résidents de l’époque. Bien sûr, ils sortent de leur personnage dès qu’il s’agit de répondre à des questions plus concrètes. D’ailleurs, des questions : nous en posons, en restant près d’une heure avec l’une des guides, qui est intarissable.

La visite se fait évidemment au choix en français ou en anglais, et comme d’habitude je choisis de parler français – nous sommes en territoire acadien, après tout. D’ailleurs, les guides le sont très souvent et sont encore une fois ravis d’entamer le dialogue sur leurs origines et les nôtres. Les bâtiments sont magnifiques, les intérieurs extrêmement soignés et le personnel charmant et érudit… J’ajouterai que l’histoire Mi-kmaq, premiers habitants des lieux, n’est pas éludée, il y a d’ailleurs une guide mi-kmaw dans la maison dédiée. J’en apprends beaucoup sur les relations entre les Français et les mi-kmaq (une relation évidemment colonialiste, mais plutôt basée sur le commerce) qui diverge fortement des relations conflictuelles entre les Anglais (qui prendront possession des lieux plus tard) et eux-mêmes. Évidemment, l’histoire et les stratégies militaires et les guerres franco-anglaises m’intéressent moins que la vie quotidienne entre les murs, même si la visite de la caserne reste intéressante. Les alentours de la forteresse nous donnent la sensation d’être quelque part dans le nord de l’Irlande – il y a du vent, il fait un froid glacial, il crachine : c’est un temps parfait pour visiter Louisbourg.

Je m’arrête évidemment visiter le cimetière du village, dans la baie, en bonne voyageuse taphophile que je suis. Le site est magnifique, même si les tombes sont relativement récentes. Noms écossais, noms français, noms irlandais… Il est étrange, ce petit coin de monde. Je me rends compte au moment de le quitter que j’ai passé l’une des meilleures journées depuis le début de notre road trip. Ce soir, l’Isle Madame nous attend, avant de quitter définitivement le Cap  Breton pour d’autres horizons néo-écossais.

Une chanson, une odeur – La forteresse de Louisbourg

Une chanson pour un état d’esprit :

L’aurez-vous compris ? Je suis mélancolique. Je transpire la mélancolie jour comme nuit depuis ma naissance. Je m’abreuve donc de toutes les formes d’art les plus mélancoliques possibles – depuis une dizaine d’années, j’ai décidé d’arrêter de lutter parce que c’était tout simplement qui je suis. Alors quand j’ai découvert cette chanson au hasard du flow de Deezer, pendant une chaude nuit montréalaise, j’ai eu un coup de coeur instantané. Elle est apparemment très connue pour être apparue dans une pub, mais je suis passée complètement à côté. C’est I will be there d’Odessa. Cette journée pluvieuse était parfaite, et l’était encore plus avec cette bande-son.

Une odeur :

Celle de la pluie mélangée à l’iode.

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